Garrel atemporel

Le Sel des Larmes, un film de Philippe Garrel, 
avec Logann Antuofermo, Oulaya Amamra, Louise Chevillotte, ...


Le Sel des larmes est exécuté dans ce qui est désormais la formule classique « Philippe Garrel au XXIème siècle » : un noir et blanc fonctionnel (pas vraiment travaillé, pas de profondeur ou de contraste) ; des rues et appartements dépouillés, jamais plus de trois acteurs - plus ou moins inconnus, plus ou moins talentueux - à l’écran simultanément ; des histoires d’amour d’un autre âge. 

Luc (Logann Antuofermo, sorti de nulle part et d’une rare transparence) est un ébéniste faussement passionné, la tête dans les nuages mais très terre-à-terre lorsqu’il s’agit de s’intéresser à chacune des femmes qu’il croise. Le passant rêveur et égaré de la première séquence qui attend son bus du mauvais côté de la rue est vite démasqué dans ses intentions, mais Philippe Garrel (72 ans), Jean-Claude Carrière (88 ans) et Arlette Langmann (74 ans) ne semblent pas vouloir adresser le problème. 

Faussement torturé, lâche et très porté sur la chair, Luc n’est jamais accusé frontalement. L’intrigue tendrait même à faire passer ses errances pour une forme de mélancolie romantique. Par ailleurs, la facilité - entre autres - avec laquelle il obtient le numéro de téléphone d’une jeune fille à un arrêt de bus (n.b. : en 2020) interroge réellement la modernité de Garrel et des ses camarades auteurs. Toutes les interactions sociales semblent du reste provenir d’une autre époque. Le film se permet une inoffensive saillie sur un racisme par ailleurs très années 90 avec l’apparition de deux fafs ridicules qui accusent Luc d’être un « traître »… parce qu’il sort de boîte avec un noir et une arabe..? Pourquoi pas. 

Une scène de danse incongrue demeure le plus beau moment de cinéma du (trop) long métrage. Le scénario erre comme son personnage principal, n’a pas vraiment de début, pas vraiment de fin. Ce Garrel demeure charmant au sens d’absolument fidèle à lui-même et auto-dispensé de modernité. 



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